Un palais de Charlemagne à Saint-Denis
A proximité de la grande église ont dû se trouver sous les Mérovingiens et les Carolingiens des édifices résidentiels aptes à recevoir la présence du souverain. Une importante découverte archéologique récente a confirmé cette hypothèse.
Il est vraisemblable que dès les règnes de Dagobert et de Clovis II (639-657) le palais était transféré occasionnellement dans les villas limitrophes de Clichy et d’Epinay. Aux abords de la basilique mérovingienne l’atrium servait aussi de structure d’accueil.
En 741, Charles Martel abandonne l’ancien palais mérovingien de Clichy aux moines de Saint-Denis, ce qui était peut-être une reconnaissance de l’abbaye comme résidence royale.
Par ailleurs, l’onction de Pépin le bref en 754 par le pape Etienne II rendit indispensable l’aménagement de logements appropriés à l’accueil d’hôtes de marque à Saint-Denis.
Enfin, vers 800, l’abbé Fardulfe s’attribue la paternité d’un palais édifié « selon la coutume des ancêtres » pour le compte de Charlemagne lui-même.
Qu’en penser ? Et qu’ont révélé les fouilles de ces 15 dernières années ?
Il semble que le secteur situé devant l’entrée de l’abbatiale (au Nord Ouest) soit l’emplacement de cet ancien palais.
L'emplacement de l'ancienne tour Nord de l'abbatiale est en bas à droite.
Plan par Michaël Wyss (Document Unité d'Archéologie de la Ville de Saint-Denis) Les fouilles effectuées au Nord-Ouest ont confirmé la présence, dès le VIII°s , de plusieurs constructions à vocation résidentielle. Elles tranchaient nettement avec les autres habitations, plus frustres, à l’architecture de bois.
On y trouve en effet des fondations maçonnées et des toits couverts de tegulae et d’imbrices, ainsi que des fragments d’enduits peints attestant l’existence d’intérieurs somptueusement décorés.
C’est dans ce secteur qu’a été édifié à la fin du VIII°s un grand bâtiment de 50 m de long et de 14 m de large, avec à l’intérieur deux salles axiales en enfilade, flanquées d’annexes plus étroites. A l’angle Sud-Est s’élevait une petite construction carrée, sans doute un escalier, ce qui permet d’envisager l’existence d’un étage.
L’une des salles possédait une cache constituée de 5 coffres et d’un tonneau enfouis dans le sol ; l’un de ces coffres nous est parvenu sous la forme d’une empreinte laissée dans la terre après putréfaction du bois. Cette cache pourrait être mise en relation avec les raids normands des années 857 et 876 sur Saint-Denis.
Là était sans doute le palais de Charlemagne, d’autant qu’a été retrouvé 30 m en arrière de l’édifice tout un système d’adduction d’eau à vocation apparemment exclusive, avec aqueduc et bassins, ainsi que des tubuli de chauffage…
Y aurait-il eu des thermes à un moment donné de l’histoire de ce palais ? On n’en a pas retrouvé de traces formelles. Mais lorsque l’on sait à quel point Charlemagne appréciait prendre les eaux et que le choix d’Aix la Chapelle n’a pas relevé du hasard, on est en droit de le supposer…