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Le tombeau de Louis d’Orléans et de sa familleChapelle du couvent des Célestins, Paris - Transféré à Saint-Denis au XIX°s
Louis d’Orléans, second fils de Charles V et de Jeanne de Bourbons, fut assassiné par son cousin Jean sans Peur, duc de Bourgogne, le 23 novembre 1407, alors qu’il sortait de l’hôtel de la reine Isabeau de Bavière, épouse de Charles VI.
Cet assassinat fut le déclencheur de la guerre civile entre Armagnacs et Bourguignons.
La Justification du duc de Bourgogne, commandée par Jean Sans Peur - Miniature illustrant la première page
Le Lion (Jean Sans Peur) bondit sur le loup (Louis d'Orléans) qui happait la couronne portée par la fleur de lysPropagande bourguignonne - BNF C’est en 1394, au lendemain du fameux « bal des Ardents » au cours duquel le roi Charles VI faillit perdre la vie, que Louis décida par remords de bâtir sur le flanc Sud de l’église des célestins une chapelle consacrée à la Trinité, à la Vierge, à saint Louis et à tous les saints. Dans son testament rédigé en 1403, il exprimait le désir de s’y faire enterrer.
Le couvent des célestins, bâti par Charles V à côté de la nouvelle résidence royale, l’hôtel Saint-Pol, et de la Bastille, fut choisi par Louis dans une démarche rompant avec les princes des fleurs de lys. Ceux-ci montraient leur attache régionale au centre de leur apanage (Bourgogne, Berry, Bourbonnais…) ; Louis restait accroché à Paris, comptant bien y défendre ses intérêts dans la politique royale face à la dynastie bourguignonne naissante.
Il demandait d’être revêtu du froc des célestins lors de la cérémonie funéraire, le corps déposé sur une simple claye à même le sol, le visage et les mains découverts. Le corps serait déposé dans la terre sans cercueil, par humilité.
En vérité, les circonstances tragiques de sa mort ne permirent pas la réalisation de ces souhaits.
Il était aussi prévu à l’origine que le duc soit représenté mort, revêtu de l’habit religieux, la tête et les pieds posés sur une pierre non taillée. Le tombeau devait associer néanmoins une dalle de marbre noir et le marbre blanc du gisant. Valentine Visconti avait déjà négocié le marché avec le sculpteur Vincent. Mais après sa mort son fils Charles le renégocia avec un sculpteur réputé sur la place de Paris, Pierre de Thoiry. On revenait alors à une iconographie traditionnelle, avec dais, gisant, pieds posés sur un lion et armoiries peintes.
Le tombeau a bien été exécuté. Mais il disparu rapidement (détruit par les Bourguignons après 1420 ?)
La ravissante Valentine Visconti, veuve inconsolable... ;
elle porte ici les armes des Visconti (la guivre) sur un écu et sur le cimier d'un casque. BNF
Son petit-fils, le roi Louis XII, partit dès son accession au trône en 1498 à la conquête du duché de Milan qu’il disait tenir de sa grand-mère Valentine Visconti. A son retour, il prit la résolution d’honorer sa famille par la réalisation d’un monument funéraire destiné à la chapelle des célestins.
Il associa les corps de ses grands parents, Louis et Valentine (+ 1408), leurs deux fils, Charles, son père (1391-1465) et Philippe, comte de Vertus (1396-1420). Il fit appel à quatre artistes génois, impressionné par l’art italien découvert durant son expédition. En 1504, le tombeau était assemblé au centre de la chapelle.
Il est conçu sur deux niveaux : Louis et Valentine montés sur un coffre central ; au dessous, de part et d’autre, leurs fils.
Gisant de Valentine Visconti -
Ciccione
Le soubassement est orné de 24 niches destinées à accueillir les statuettes des évangélistes, des apôtres, de saints (saint Maurice ; sainte Catherine, saint Grégoire, sainte Geneviève, saint Laurent, saint Jean-Baptiste, saint Sébastien, saint Etienne, sainte Marie-Madeleine).
Sainte Geneviève -
photo de Claude Sauvageot ( St Denis, dernière demeure des rois de France, ed. Zodiaque 1999) Bouleversé à la Révolution, le tombeau fut amené sur ordre de Louis XVIII à Saint-Denis, morceau par morceau. Il n’a pas vraiment repris son aspect originel. En tout cas, sa présentation à deux niveaux est unique en France. Même si la réalisation est italienne, les gisants témoignent d’une iconographie en partie française : le costume, les yeux clos, les mains jointes. Le traitement est en revanche italien pour la douceur et les plis.